Guy Montarien, l'homme qui plantait des âmes
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Guy Montarien, l'homme qui plantait des âmes

Jean-François Chemain

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   La foule qui, en 2005, se pressait aux funérailles de l’abbé Guy Montarien, à la chapelle polonaise de Paris, témoigne du rayonnement extraordinaire de celui dont la devise était pourtant beati mites, « bienheureux les humbles ». Il n’a pas fondé de communauté, ni écrit de livres. Son apostolat s’est « limité » à une absolue disponibilité à chacun, scouts, étudiants et lycéens dont il était l’aumônier, aussi bien qu’à des inconnus croisés dans le métro et qu’attiraient à lui son sourire et sa soutane.
   Cette soutane, il n’a jamais voulu la quitter, tant elle représentait à ses yeux la marque visible de son sacerdoce. Une fidélité, dans l’obéissance, qui lui valut d’être marginalisé dans l’Église de l’après-Concile en proie au marxisme et à la sécularisation. S’il en souffrit, il n’en tira jamais aucune amertume, conservant une inaltérable bonne humeur qui dissimulait sa souffrance. Sine dolore, non vivitur in amore, sans souffrance, on ne vit pas dans l’amour, aimait-il à dire, citant L’imitation de Jésus-Christ.
   Quinze ans après sa mort, il éclaire encore le chemin de tous ceux qui l’ont rencontré.

   Jean-François Chemain, docteur en histoire, enseignant en ZEP durant dix ans, œuvre au sein d’une association de soutien aux convertis persécutés. Il a récemment publié Ils ont choisi le Christ (Artège, 2019).

Dans la presse

Aletheia, n° 307, 20 juin 2021

   L’abbé Montarien fut, selon les mots de l’abbé Grégoire Célier qui l’a bien connu lorsqu’il était scout et lui servait la messe, « un prêtre fervent, zélé et joyeux »1. Prêtre du diocèse de Paris, il fut non un fondateur ou un bâtisseur, mais eut une influence spirituelle considérable, malgré un ministère exercé hors-cadre dans les trente dernières années de sa vie.
   Hilaire de Crémiers, qui l’a connu dans les années 1970, dit de l’abbé Montarien qu’il était « le plus inconnu des prêtres de son temps tant il était modeste, le plus célèbre en même temps tant il avait de rayonnement mais toujours dans la discrétion.» On le vit bien lors de ses obsèques en juin 2005 à Notre-Dame de l’Assomption, qui se révéla trop petite pour accueillir la foule qui voulait lui rendre hommage et prier pour lui. « Il y avait là, écrit aussi Hilaire de Crémiers, des scouts, bien sûr, ceux qu’il avait dirigés spirituellement, mais aussi quantité d’amis, du plus beau monde et des grades les plus élevés de l’Armée jusqu’aux plus petites gens – dont il se targuait d’être –, qui lui devaient tout, sinon presque tout. »
   Au lendemain de sa mort, un site dédié à sa mort a été créé, Beati mites. Il est toujours actif. Jean-François Chemain, qui ne l’a pas connu, lui consacre une belle biographie. Il a recueilli le témoignage d’une centaine de personnes qui ont été marquées, influencées ou converties par ce prêtre modeste « qui plantait des âmes ». Il a consulté aussi son dossier ecclésiastique dans les archives du diocèse de Paris.
   Ordonné en 1954, l’abbé Montarien a occupé successivement divers postes : d’abord préfet de division au collège Stanislas, puis six mois plus tard nommé vicaire à Levallois-Perret, il devient aumônier de lycée en 1957, avant d’être nommé en 1968 second vicaire à Saint-André de l’Europe, près de la Gare Saint-Lazare. Dans la crise que traverse alors l’Église (bouleversement de la liturgie, crise du catéchisme, politisation du clergé), l’abbé Montarien «ne se retrouve pas», selon la formule de Jean-François Chemain : «il ne se révolte certes pas, mais fait ce qu’il veut, ou plutôt ne fait pas ce qu’il ne veut pas».
   La mésentente entre le second vicaire et son curé, que J.-F. Chemain appelle «le père H.», va grandissant. En septembre 1973 dans une lettre au secrétariat du cardinal Marty, le curé de Saint-André de l’Europe résume ses griefs envers son vicaire : « refus absolu d’entrer dans la catéchèse actuelle et d’utiliser les manuels en usage (il continue de faire des questions-réponses), célébration exclusive du canon romain de la messe de Paul VI, usage de l’ordo de saint Pie V dans les messes libres, ainsi que dans les messes pour les scouts, les baptêmes et les mariages, peu de place laissée aux laïcs et aucune aux femmes, refus de participer au conseil de l’équipe sacerdotale, et a fortiori aux conseils paroissiaux avec des laïcs ». Auraient pu être ajoutés, note J.-F. Chemain, « le reproche de passer deux heures par jour au confessionnal au détriment de la pastorale et des absolutions collectives, et le temps consacré aux scouts. Sans oublier le refus de quitter son inamovible soutane ».
   À deux reprises, J.-F. Chemain indique que l’abbé Montarien a été dès 1973 « déchargé de toute fonction » (p.55), privé de « tout ministère officiel » (p.126). Pourtant dans l’Ordo administratif du diocèse de Paris il figure encore comme vicaire de Saint-André de l’Europe jusqu’en 1975, et le Fichier des prêtres conservé aux Archives historiques de l’archevêché de Paris (AHAP) indique la même date. Ce n’est donc qu’en 1975 que l’abbé Montarien s’est retrouvé sans affectation officielle, « en retraite ou en congé » selon la formule en usage à l’époque. Il est à signaler qu’à cette date 92 prêtres du diocèse en Paris se trouvaient dans cette même situation. Ils n’avaient fait l’objet d’aucune sanction canonique qui les aurait écartés du ministère, mais ils n’avaient pas non plus d’affectation officielle. Pour certains c’était un choix personnel (ainsi l’abbé Richard, co-fondateur de L’Homme nouveau, était « en retraite ou en congé » depuis 1954), pour d’autres c’était une mise à l’écart (ainsi Mgr Ducaud-Bourget fut « en retraite ou en congé » à partir de 1972).
   Dans le cas de l’abbé Montarien sa mise à l’écart en 1975 est une sorte de sanction non-officielle («frappé d’ostracisme parce qu’il n’est pas dans la ligne pastorale moderne» dit justement J.-F. Chemain), mais c’est aussi une conséquence de son tempérament, « une sorte d’esprit d’indépendance qui rend pesante toute autorité immédiate » reconnaissait l’abbé Montarien, en 1973, dans une lettre à Mgr Frossard, évêque auxiliaire de Paris.
   J.-F. Chemain relève aussi que les autorités diocésaines ne l’ont pas complètement abandonné. Elles «renouvellent année après année son celebret […] reconnaissent volontiers qu’il est en ”parfaite communion” avec l’Église, et multiplient même les petits gestes personnels et amicaux».
   Prêtre sans affectation à partir de 1975, l’abbé Montarien continuera à être aumônier de troupes scoutes, aumônier du pèlerinage des étudiants d’Assas à Chartres (avant la naissance du Pèlerinage de Chrétienté en 1983), et aussi confesseur et directeur spirituel. J.-F. Chemain rapporte nombre de témoignages d’âmes qui ont été guidées par lui vers le sacerdoce, vers la vie religieuse ou confortées dans leur vocation de laïc. Lorsque Paul Touvier fut arrêté en 1989 et emprisonné à Fresnes, l’abbé Montarien accepta de devenir son confesseur. C’est l’avocat Jacques Trémolet de Villers qui avait suggéré son nom. Pendant sept ans, jusqu’à la mort de Touvier, l’abbé Montarien a accompli son ministère auprès de cette âme. Il s’est «rendu une ou deux fois par semaine à Fresnes, ce qui lui prenait l’après-midi. Il noua une véritable amitié spirituelle avec celui à qui la justice des hommes n’avait pas pardonné ses crimes, mais qui s’apprêtait sereinement à affronter celle de Dieu.»
   Pour finir on relèvera cette réponse que rapporte J.-F. Chemain dans son beau livre : à un prêtre qui était venu se plaindre que l’abbé Montarien, par ses messes en latin, mettait en péril « l’esprit du concile », le cardinal Lustiger aurait répondu : « Ne touchez pas à Montarien ! il forme des prêtres et des familles. »
Yves Chiron

Famille chrétienne, n° 2244, 16-22 janvier 2021

   Sa vie sacerdotale traverse les tourments de l’Église de France post-conciliaire. L’abbé Montarien (1925-2005), dont Jean-François Chemain nous offre la biographie, est un homme admirable. Un prêtre qui a fait de la fidélité à l’Église sa marque de fabrique. Quitte à le payer cher. Rejeté par les milieux intégristes, mal vu par les progressistes avec sa soutane, l’abbé célèbre selon le rite Paul VI. Mais en latin. Ostracisé, il garde son humour et sa finesse. Aumônier scout, accompagnateur spirituel, il attire à lui des générations de jeunes autour de la chapelle polonaise, à Paris. Il fut « un planteur d’âmes », selon son biographe. Tous ceux qui ont pu en bénéficier – comme le rédacteur de cette recension – peuvent en témoigner.
Samuel Pruvot

France catholique, n° 3709, 22 janvier 2021

   Comment rassembler les témoignages d’une multitude de gens qui se sont sanctifiés au contact de Guy Montarien mais n’ont jamais rien écrit ou si peu ? Et voilà que Patrick Récipon pense à Jean-François Chemain qui a déjà donné des preuves de son talent littéraire et de l’orientation de ses idées, mais qui n’a jamais connu le défunt abbé. Qu’à cela ne tienne ! Tous ceux qui l’ont connu et pourront être contactés fourniront leur témoignage et les documents qu’ils possèdent encore. À Jean-François d’en faire la synthèse ! Il en résulte un livre passionnant et sanctifiant, bien propre à donner confiance à nos contemporains dans les voies de la Providence.

A contre-courant
   Qui était l’abbé Montarien ? Né en 1925, ordonné à 29 ans en 1954, après quelques études supérieures et un séjour en Angleterre, prêtre diocésain jusqu’en 1973, chargé de divers ministères, il est généralement apprécié de ses fidèles ; il se soumet sans mot dire à ce qui est obligatoire : il adopte le nouvel ordo de la messe, mais le dit en latin et n’utilise que le premier canon. Il continue à pratiquer ce qui n’est pas formellement interdit : enseigne le catéchisme par questions et réponses, passe des heures à confesser, et surtout garde sa soutane qui lui vaut le rejet dans l’Église, mais de fructueuses rencontres… D’abord amicalement invité à le rejoindre, en 1968, par un confrère parisien, à Saint-André-de-l’Europe, son attitude est si différente de celle des autres prêtres – auxquels il n’adresse pourtant pas la moindre critique – qu’au bout de cinq ans, il est déchargé de toute fonction officielle et privé de son logement. Mais il conserve son celebret qui lui est renouvelé d’année en année. Dans une situation semi-officielle, «marginalisé par l’Église, il y conservait une immense aura». La haute hiérarchie l’observe. Peut-être sera-t-il utile un jour. Il approche de la cinquantaine. Que faire ?

La paroisse polonaise
   La Providence veillait. Tout s’arrange et prend tournure. Une riche paroissienne, séparée de son mari (mais non divorcée), et sans enfants, lui fait cadeau d’un petit 2 pièces au rez-de-chaussée, 4 rue de Turin, assure le plus souvent son déjeuner, et met à sa disposition son grand appartement quand il a besoin de réunir une troupe de scouts. Quand elle meurt en 1992, une autre prend la relève. Une rencontre avec le P. Dziech, qui ne dépend pas de l’archevêque de Paris, lui ouvre les portes de la paroisse polonaise installée en plein cœur de la capitale, dans une belle église en rotonde datant du XVIIe siècle. Elle ne tardera pas à ce remplir de scouts à qui il impose, à la messe, une attitude impeccable et où il pratique, avec le nouvel ordo, une liturgie latine très soignée. Lorsque c’est possible, de bons musiciens l’accompagnent. Il évite ainsi, à ceux qui le suivent, une querelle des rites. Pendant une trentaine d’années (1974-2004), l’abbé Montarien exerce, dans la discrétion, le plus fécond des apostolats auquel est consacré l’essentiel du livre (à partir de la p. 45) une mission qui n’avait plus rien d’officiel, qu’il n’avait pas cherchée, un appel du Ciel.

Auprès des scouts
   Il n’a jamais été scout et n’est pas particulièrement intéressé par le scoutisme. Pourtant, la première clientèle qui s’est offerte à lui est celle de scouts, socialement très mêlés, qu’il emmène en de grandes randonnées dans l’Ouest parisien. On se réunit d’abord dans une péniche amarrée près du pont de Saint Cloud, fournie par Dassault. Une autre de ses activités est le pèlerinage de Chartres. Il ne participe pas à son organisation, mais il est là, toujours présent et prêt à recueillir des confessions et à donner des orientations. Il organise des pèlerinages à Alençon, à Domrémy, et ailleurs, toujours disponible et prêt à se rendre où on l’appelle. Il ne fait jamais de politique. À la paroisse polonaise, il dit la messe tous les jours et le bouche à oreille fonctionne. Il fait le plein. Il est plus à l’aise avec les garçons qu’il tutoie qu’avec les filles qu’il vouvoie, en particulier dans ses séances de catéchisme à l’institution Saint Pie X de Saint Cloud. En 1977, dans les années difficiles de l’après concile, il voit avec douleur un grand nombre de ceux qui l’ont suivi jusque-là le quitter pour Saint Nicolas du Chardonnet. Mais bientôt, beaucoup de jeunes gens qui n’ont pas voulu les suivre, et sont découragés par la religion officielle, se regroupent autour de lui. C’est un point fixe dans le chaos ambiant. Ce prêtre discret est un personnage à deux faces : c’est un homme replet, joyeux et généreux, financièrement aidé par des personnes anonymes, qui mange et boit bien à table, et, dans les moments de détente, sait pousser la chansonnette, parfois à la limite du convenable, comme le montre le florilège rassemblé en fin de volume par J.-F. Chemain, avec des articles parus dans la revue scoute Birex, et quelques lettres à ses dirigés. Mais, comme il le dit en conclusion d’un article de Birex, « je suis joyeux parce que je veux l’être. Je suis joyeux quand je veux l’être ». Certains signes, malgré sa discrétion, montrent qu’il y a aussi chez lui un ascète, qui se lève le matin à quatre heures trente pour une heure de méditation, qui a renoncé progressivement à la cigarette et aux invitations en ville, qui au moins à la fin de sa vie, selon une confidence au P. Diesz, se donne la discipline… Il écrit quelque part : « Un saint est quelqu’un qui a cessé de se regarder et qui ne regarde que Dieu. »

Une formation solide
   Dans une ambiance « gavroche », pendant une séance de « catéchisme ouvert », dans les locaux de la « Polo », animé d’une profonde ferveur, il dispense une solide formation doctrinale, un enseignement très sûr et très complet. À la fin, on chantait un Salve Regina qu’on suivait dans les prières, à la fin de son manuel, après quoi, il confessait quelques uns. Il se confesse lui-même tous les lundis au même prêtre de l’Opus Dei. « La direction spirituelle et la confession, c’est ce qui me prend le plus de temps », dit-il. Dévot de la Vierge Marie on le trouve souvent, chez lui, en train d’égrener son chapelet. En fait, il ne se soucie que du Salut des âmes. La vie spirituelle de l’abbé, forte et discrète à la fois, impressionne . Seul, Notre-Seigneur sait le nombre de vocations qu’il a suscitées, combien précieuses, à une époque où l’Église catholique subit une crise d’une particulière intensité, vocations sacerdotales et monastiques, mais aussi bons et solides mariages, avec de nombreux enfants élevés dans la religion catholique .

Une fécondité extraordinaire
   Les 5 et 6 juin 2004, beaucoup de ses anciens dirigés se regroupent à Paray-le-Monial pour fêter le cinquantième anniversaire de son ordination. Il est très amaigri et semble « au bout du rouleau » dans cette réunion de famille dont reste un livre d’or rempli des messages qui célèbrent sa fécondité extraordinaire. Il a encore un an à vivre et meurt le 13 juin 2005. Il est maintenant notre intercesseur pour la réconciliation à l’intérieur de l’Église, encore si divisée. On aimerait que le livre que Jean-François Chemain a eu le mérite de composer, serve de base à une enquête qui le rendrait d’abord « vénérable », puis « bienheureux » et finalement peut-être « saint ».
Jacqueline Picoche

978-2-37271-167-8
31 Produits

Fiche technique

Couverture
souple
Date de parution
décembre 2020
Dimensions
13,5 x 20,5 cm
Pages
192, avec un cahier photos
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