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Pierre-Antoine Cousteau

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Préface de Ghislain de Diesbach

   Incarcéré à Fresnes le 12 janvier 1946, Pierre-Antoine Cousteau ne retrouve la liberté que le 18 juillet 1953, et son premier acte d’homme libre est d’aller fleurir la tombe de sa maman disparue, à Saint-André-de-Cubzac.
   Mais quelle est donc sa vie de captif, durant ces 17 mois à Fresnes dont 141 jours aux chaînes, et 7 ans à Clairvaux et Eysses ? Le journal inédit publié ici, soixante ans après sa mort prématurée à 52 ans de suites d’un cancer lié à sa détention, dévoile le rude quotidien du journaliste et de ses compagnons d’infortune, resté droit dans ses bottes et attentif au monde extérieur.
   Devenu l’intime de Lucien Rebatet, l’ancien rédacteur en chef de Je suis partout lit et écrit. Il lit énormément et exprime son bonheur à découvrir Proust, Rivarol, Aymé, Wilde, Shaw, Huxley, Nietzsche, France, Dostoïevski, Machiavel, Hemingway, Anouilh, Laurent, Mohrt, Koestler, etc., et écrit plus encore, « il écrit plus librement qu’il n’eût pu le faire en homme libre » : ses réflexions devant la mort, Dieu, les religions, la démocratie, la poésie, la littérature, le bagne, la fidélité à ses engagements, et son pessimisme souriant se retrouvent aussi en des pensées et aphorismes où se concentre son regard sur la vie.
   Il écrit ce qu’il est. Le résultat, outre ses lettres à son épouse Fernande et à son frère le célèbre commandant Cousteau, c’est ce journal, Intra muros, qui n’est de fait pas un journal comme les autres mais une chronique de huit ans d’éditoriaux du plus haut intérêt. Une comédie humaine sans concession pour ses contemporains, juges, politiques, écrivains et journalistes, acteurs ou témoins de l’effondrement de l’Occident moderne.

   Frère du commandant Jacques-Yves Cousteau, Pierre-Antoine Cousteau (1906-1958) est un journaliste et écrivain dont Jean Galtier-Boissière dit qu’il fut « le plus brillant de sa génération ».

Dans la presse

Valeurs Actuelles, 1er février 2018

Un petit tout d'écrou 

   Emprisonné pour faits de collaboration, Pierre-Antoine Cousteau en a tiré un journal drolatique et mordant, vivant témoignage de la société parallèle qui croupissait alors à Fresnes ou à Clairvaux.

   En 1945, dans la famille Cousteau, la célébrité s'appelai Pierre-Antoine et non Jacques-Yves. Loin des épopées aquatiques de son cadet, "PAC" était alors le grand patron de Je suis partout et de Paris-soir, journaux phares de la collaboration. Raison pour laquelle, en 1946,  il fut logé à Fresnes, au quartier des condamnés à mort - malgré les témoignages du résistant Jacques Perret ou du communiste Jacques Yonnet, qui défendirent un "ennemi fraternel" et un "homme d'honneur".
   Pour tuer le temps, PAC brique le sol de sa cellule avec le culot d'une bouteille d'encre et, à ses moments de faiblesse, tient son journal: "Je préférerais passer ces heures à jouer au bridge, ce serait plus élégant […]. Mais je suis seul dans mon cachot."
   Avec Intra Muros, Cousteau nous ouvre les portes des prisons de l'épuration comme Paul Morand celles de la haute société. Mais les mondanités se déroulent dans les couloirs de Fresnes ou au bagne de Clairvaux. Et Jeannot-le-Balafré donne son avis aux anciens ministres, d'égal à égal. Au courrier, PAC croise Benoist-Méchin, "toujours sympa et faisant des bons mots", l'académicien octogénaire Abel Hermant - affectueusement surnommé "Fred la Bise"-, Charles Maurras, et cent lecteurs de Je suis partout… Il découvre que les durs ont parfois un cœur d'artichaut, tel ce briscard de la LVF, dont l'épouse, enceinte d'un autre, demande le divorce: "Au lieu de garder ça pour lui, il nous demande de signer une lettre expliquant que ce n'est ni gentil ni chrétien. J'ai signé, bien sûr. Mais je doute que ce référendum des morts en sursis change l'opinion de Madame."
   En 1947, sa peine est commuée en prison à vie. Cette décision lui semble typique du manque de sérieux démocratique, mais après cent quarante et un jours de chaines, l'espoir revient: "Je ne crois pas que, depuis Vercingétorix, on ait envisagé la perpétuité avec autant d'optimisme."

"La politesse prend en cellule un prix incomparable"
   Quand il ne lit pas (tout Hugo, Proust, etc.), il écrit. Sur le bagne, les vainqueurs, les vaincus, Dieu, la démocratie… Rêve de revoir sa famille, mais se console en songeant que, dehors, il y a Sartre. Se solidarise des tourments logistiques de Napoléon à Sainte-Hélène. "Les familles n'ont jamais su faire un colis de prison." Son intérieur l'étonne: "Sur nos murs, un badigeon verdâtre évoque un aquarium. Mon petit frère serait comme chez lui." Il s'adonne au basket-ball: "Nous volons de victoire en victoire. L'équipe qui nous battra n'est pas encore incarcérée!"
   Deux choses lui semblent impardonnables. Le reniement: "Iscariote, nous voilà! Où en serait le christianisme si les premiers chrétiens avaient esquivé la petite formalité des lions, en jurant qu'ils n'allaient dans les catacombes que pour servir d'agents à la flicaille de Néron?" Et la mauvaise tenue: "La politesse prend en cellule un prix incomparable. […] Bavardé hier avec un Lucien [Rebatet] prodigieusement hirsute. Mieux vaut se raser tous les jours qu'emmagasiner dans la crasse et le débraillé des ribambelles de vers latins."
   Tout au long de 485 pages résumant huit années de prison (il sera gracié en 1953 par Vincent Auriol), PAC maintient un mordant mélange d'élégance distanciée, d'ironie et de vacherie franche et sincère, que seuls autorisent un talent supérieur et la certitude d'écrire sans lecteur.
Pierre-Alexandre Bouclay

978-2-37271-084-8
47 Produits

Fiche technique

Couverture
souple
Date de parution
août 2017
Dimensions
16 x 24 cm
Pages
486
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